ÉTUDE ÉPIDÉMIOLOGIQUE SUR LES PETITS ÂGES GESTATIONNELS

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Au cours de la webconférence que nous avons organisée avec les familles le 11 novembre 2023, beaucoup d’enfants, de parents et de jeunes adultes ont apporté leurs témoignages sur leur vie, sur les difficultés rencontrées et les moyens mis en place pour les surmonter. Vous pouvez les consultez ci-dessous.

Témoignages vidéos

Des sujets d'actualité

Mettre un terme à l’errance diagnostique, repérer le plus tôt possible les troubles de neurodéveloppement et proposer des prises en charge précoces : c’est l’objectif du nouveau « service public de repérage et d’accompagnement précoce 0 – 6 ans », quel que soit le handicap, promis par Emmanuel Macron à la Conférence nationale du handicap en mai dernier. Ce mardi, le président de la République doit préciser cette mesure dans le cadre de la nouvelle stratégie pour les troubles du neuro-développement (2023 – 2027). Après une première stratégie très axée sur les troubles du spectre de l’autisme (TSA), le gouvernement insiste sur l’importance d’agir sur tous les troubles du neuro-développement – autisme, dys (dyslexie, dyspraxie, dyscalculie…), déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH), trouble du développement intellectuel (TDI) – car ils se cumulent fréquemment. Aujourd’hui encore, le diagnostic précoce comme la prise en charge restent un parcours du combattant pour de nombreuses familles.

Le Figaro, 14/11

 

La rééducation intensive par le jeu pour des jeunes enfants vivant avec une paralysie cérébrale est plus efficace pour améliorer la motricité des mains et des jambes que toutes les autres thérapies proposées actuellement, selon les résultats d’une étude européenne, publiés dans la revue Jama Pediatrics. Ces résultats « doivent changer non seulement les techniques actuelles de rééducation des enfants avec paralysie cérébrale dans la petite enfance mais également les politiques en matière d’organisation de la rééducation », a plaidé lundi le Dr Alain Chatelin, président de la Fondation Paralysie Cérébrale, dans un communiqué. Grâce à la rééducation intensive par le jeu, « en l’espace de 3 mois, les enfants gagnent en moyenne 10 % de motricité des mains », a précisé la professeure Yannick Bleyenheuft de l’université belge de Louvain.

AFP, 13/11

Témoignages écrits

Témoignage de A et S, parents de E, né à 29 SA et 3 jours

Nous sommes les parents de E (A et S) né à 29 SA + 3. Il est âgé de 11 ans.

Il a été scolarisé 4 ans en maternelle avec une AVS puis est sorti du système scolaire pour intégrer une IME pour enfants polyhandicapés.

Le deuil de l’école a été très difficile mais indispensable pour son bien-être. E présente des difficultés motrices, il marche seul depuis 1 an environ et a un gros retard de langue et d’autonomie.

Il a des prises en charge toutes les semaines, kiné, orthophoniste en libéral et psychomotricité et ergothérapeute au centre. Il va à l’IME également chaque jour du lundi au vendredi.

Nous avons fait le choix de continuer notre vie professionnelle tous les deux mais la vie au quotidien n’est pas toujours évidente à gérer.

Il faut tout prendre en compte : nos heures de travail, heures d’école, prise en charge hebdomadaire, rendez-vous médicaux et soins quotidiens. Nous avons une auxiliaire de vie pour aider E le matin et tous les soirs en fonction de nos horaires de travail.

A sa naissance et pendant presque 1 an, E passait son temps à l’hôpital et nous aussi donc les prises en charge ont été difficiles et tardives à mettre en place du fait de son état de santé très fragile dont il garde encore beaucoup de séquelles aujourd’hui.

Notre plus grosse difficulté a été de trouver de bons professionnels pour aider E et adaptés à son handicap ainsi que pour l’orientation scolaire.

Malgré tout, il a fait de beaux progrès au niveau de la marche et gagne en autonomie au quotidien et dans la vie de tous les jours.

Nous avons emmené E cet été en centre de rééducation en Espagne car inexistant en France, ce qui est fort dommage car la thérapie intensive apporte des progrès significatifs pour l’enfant et sa famille avec beaucoup de conseils adaptés.

Le suivi psychologique est insuffisant voire inexistant sur certaines périodes que nous avons vécues, surtout lors des hospitalisations prolongées. E a été opéré 12 fois depuis sa naissance. Nous aurions aimé avoir plus d’aide, de soutient, d’écoute.

Le grand frère d’E, K alors âgé de 4 ans à sa naissance, a tout vécu avec nous, les soins, le quotidien. Il est resté très marqué et très proche de son petit frère.

La prématurité et le handicap reste un bouleversement dans la vie des familles et pour les fratries également.

Nous sommes engagés aujourd’hui et plus que jamais auprès de SOS Préma pour aider les familles à traverser cette épreuve.

A et S, parents de E, né à 29 SA et 3 jours

Témoignage de A, maman de I, née à 27 SA et 5 jours

I est une petite fille qui est né à 27 semaines et 5 jours. Nous avons de la chance car elle n'a pas de séquelles.

Après niveau scolarité, je ne sais pas si c'est en lien direct avec sa prématurité, mais elle a quand même eu des difficultés d'apprentissage qu'elle a su surmonter grâce à l'aide de l'institutrice, des aides extérieures et de ses parents (surtout son papa qui a beaucoup de patience).

Par contre, quand elle a eu 6 ans, je me suis sentie très seule. On a commencé à me dire qu'il fallait qu'elle voie une orthophoniste. Il a fallu que j’en trouve une, chose qui est quand même très difficile. A partir de 6 ans, ils ne sont plus suivis par le Camps et on se retrouve abandonné. Moi en tout cas, j'ai eu l'impression d'être complètement abandonnée.

Puis après on nous a parlé de la psychomotricienne. Ça devait être en CE2 car elle écrivait avec un peu de difficulté. Donc là pareil, je me suis retrouvée un petit peu seule. Alors, heureusement, mon pédiatre a pu m'aiguiller sur une psychomotricienne adorable. On a commencé par un bilan, elle n'a pas trouvé de troubles "dys", par contre, nous avons travaillé sur les réflexes archaïques pendant près de 2 ans et demi. Cela a été efficace car maintenant I écrit très bien.

Après je dirais que les autres difficultés sont plus sur le comportement. Je ne sais toujours pas si c'est en lien avec sa prématurité, mais I a beaucoup de mal à gérer la frustration, le « non » et le « stop ». Heureusement, en grandissant, ça s'estompe un peu plus.

Pour les devoirs, depuis le début d'année, elle est beaucoup plus autonome. Encore l'année dernière, et ce depuis le CP, le moment des devoirs était très très difficile. On était confronté à une jeune fille qui nous faisait des crises de nerfs. Elle se mettait à pleurer, à crier et a jeter ses affaires. C'était très difficile à canaliser.

Pour finir sur du positif, I a aujourd'hui 12 ans, elle est en 5e et sa scolarité se passe plutôt bien malgré ses petites difficultés. Elle a son cercle d'amis, elle ne lâche pas et travaille. Elle a d'ailleurs les « félicitations » et encouragements des professeurs. L'année dernière sa moyenne est restée à 13,5 toute l'année. Donc pour une jeune fille qui n'aime pas vraiment l'école et qui a des petites difficultés d'apprentissage, c'est une très belle moyenne !

A, maman de I, née à 27 SA et 5 jours

Témoignage de F, maman de L et E, nés à 31 SA et 2 jours

Je m'appelle F, je suis la maman de L et E, jumeaux nés en 2011 à l'hôpital Port Royal, Paris 14ème.

Mon accouchement :

J'ai été suivie à la Maternité Notre-Dame de Bon Secours, grossesse gémellaire à risque.

Le terme initial était le 9 juillet 2011.

Un matin je me lève après une très mauvaise nuit, le visage boursouflé, je ne me suis pas reconnue dans la glace. Inquiète je me rends aux urgences. Ma tension était à 21, les analyses montrent de protéines dans les urines, j'ai des œdèmes au niveau du visage des jambes et des bras.

J'ai été admise à la maternité et prise en charge pour une pre- éclampsie à 29 semaines aménorrhée. 

La Maternité Notre-Dame de Bon Secours est niveau 2.

Par précaution, en raison du weekend de Pâques, les médecins ont décidé de me transférer à l'hôpital Port Royal de niveau 3 avec un service de réanimation dédié aux grands prématurés. 

Ce transfert a été source de stress, je quitte une chambre individuelle et une équipe de sages-femmes et d'aides-soignantes disponibles et bienveillantes pour arriver dans un service chargé ou le personnel est en tension. Je suis installée dans une chambre d'attente avant accouchement, où je vois en une nuit 2 femmes arriver, en train de gémir de douleur avant d'aller accoucher.

Heureusement le lendemain, on m'installe dans une autre chambre fixée que je partage avec une femme.

J'ai peur, je ne comprends pas trop ce qui m'arrive, ce n'est pas l'image que je me faisais de la grossesse. Mon état émotionnel oscille entre la peur et la culpabilité. Peur de ne pas y arriver, sentiment de culpabilité, je ne suis pas capable de mener ma grossesse à terme, de protéger mes enfants, je ne me sens pas à la hauteur.

J'essaye de tenir en me disant que chaque jour qui passe est un jour de plus de gagné sur la prématurité. Je suis fatiguée, ma tension a de plus en plus de mal à se stabiliser. 

Après une prise de tension élevée (à la cheville), je me retrouve au service chirurgie obstétrique où une seconde prise de tension (au bras) indique une tension à 14. Finalement on me ramène dans ma chambre. La peur, l'angoisse à chaque fois que j'entends dans le couloir le grincement des roues du tensiomètre qui s'approche de ma chambre (je n'oublierai jamais son bruit).

Deux jours avant l'accouchement on me demande si je suis d'accord pour que l'activité cérébrale de mes enfants soit examinée par une professeure canadienne en visite à l'hôpital. J'accepte volontiers, de ce que j'ai compris l'examen a montré des anomalies au niveau des synapses et que mon fils n'était plus alimenté et qu'il ne prenait plus de poids. La veille de l'accouchement, je ne parviens pas à trouver le sommeil, j'ai du mal à respirer. Le lendemain matin je constate que je vois un voile noir à la moitié de chaque œil. J'en informe l'infirmière qui prévient le professeur et ses collègues qui viennent me voir et me disent qu'il va falloir programmer la césarienne pour 16h ou le lendemain matin. Je leur dis 16h car je ne pense pas que mon corps va tenir jusqu'au lendemain. 

A 31 semaines et 2 jours je passe au bloc opératoire après une rachis anesthésie, au moment de l'incision c'est sensible sur la moitié de mon ventre, je sens l'anesthésie uniquement à gauche. L'anesthésiste me voyant paniquer me fait une anesthésie générale. 

J'ouvre les yeux dans la salle de réveil, on me dit que la césarienne s'est bien passée et que les jumeaux sont dans le service de réanimation. Ne pouvant pas me lever il m'est impossible de me rendre auprès de mes enfants. C'est émotionnellement très difficile pour moi, la frustration, la douleur, l'angoisse, et la fatigue me plongent dans une grande tristesse, mes larmes ne cessent de couler. L'une des sages-femmes m'apporte une photo de mes jumeaux ce qui m'a apaisé, j'ai pu m'endormir après. Le lendemain ma mère me conduit en fauteuil roulant à l'entrée du service de réanimation, seuls la mère et le père peuvent rentrer. 

Je me vois encore devant la couveuse de mon fils saisie par une vive émotion à la vue d'un si petit être, si fragile que j'ai peur de le toucher, j'avance une main tremblotante pour le caresser et lui parler. On me montre la couveuse de ma fille, elle est sous respirateur et traitement UV, les larmes me montent à nouveau. Je m'en veux de ne pas avoir été capable de les porter jusqu'à une date proche du terme comme une mère est censée le faire. 

De retour dans ma chambre je suis sonnée, l'angoisse me prend aux tripes, j'ai eu peur de mourir, j'ai eu peur de perdre mon fils, je m'inquiète maintenant pour leur bon développement jusqu'à ce qu'ils puissent quitter le service. Ma tension baisse progressivement mais elle est toujours élevée. Je pleure régulièrement (les hormones y sont pour quelque chose aussi), je suis connue des aides-soignantes comme la maman qui pleurent. On me change le pensement de la cicatrice de la césarienne, qui saigne toujours. Le lendemain soir les saignements sont toujours là. Le chirurgien de garde décide de me faire passer au bloc pour une reprise de césarienne car il y a un gros hématome qui provoquent les saignements et empêchent la cicatrisation. Il est minuit passé j'hésite à prévenir mes proches de peur de les inquiéter. Je suis stressée à l'idée de passer à nouveau au bloc, je me dis et si ça se passe mal, si je ne reviens pas. Nouvelle rachianesthésie, je suis anémiée ils ont hésité à me faire une transfusion de sang, l'intervention s'est bien passée.

Mon conjoint a pu me rejoindre et nous avons pu aller voir nos enfants ensemble ce qui m'a fait du bien.

Les enfants ayant pris suffisamment de poids ont pu sortir du service de réanimation, et on m'a proposé de les transférer à la maternité Notre Dame de Bon Secours qui est plus proche de chez moi et de chez mes parents. Le transfert s'est fait avant que je n’aie pu sortir de l'hôpital, c'était un samedi, j'attendais le bon de sortie de l'interne de garde qui était frileux et n'a pas voulu me le faire. J'allais être héberger chez mes parents le temps de bien récupérer. Pour moi il était impossible que je reste à Port Royal alors que mes enfants étaient à la maternité Notre Dame de Bon Secours. J'ai quitté l'hôpital en signant une décharge.

J'allais voir mes enfants tous les jours, malgré ma fatigue et ma béquille car j'avais encore des douleurs. Ils étaient nourris par sonde gastrique et surveillés avec des capteurs reliés aux écrans, c'était impressionnant. Un jour voyant mes enfants pleurer parce qu'il était l'heure du passage de la sage-femme pour leur donner leur lait via la sonde, je me suis énervée parce que cela faisait une demi-heure qu'ils pleuraient, j'étais impuissante et lorsqu'elle est enfin arrivée je lui ai manifesté mon mécontentement et je me suis mise à pleurer. Elle a toute suite compris que psychologiquement je n'allais pas bien, elle m'a proposé de prendre un rdv avec la psychologue de la maternité ce que j'ai accepté. C'était la première fois depuis mon arrivée aux urgences que mon bien-être psychologique a été pris en compte. J'ai pu lors de ce rdv avec la psychologue aborder la peur de mourir, la peur de perdre mes enfants, la culpabilité de ne pas être allée plus loin dans la grossesse, la culpabilité de ne pas sentir ce supposé instinct maternelle que je suis censée ressentir dans ma vision idyllique de la maternité. Je n'étais en rien préparée à vivre ce par quoi je suis passée.

Après deux mois de couveuses j'ai pu ramener les enfants à la maison tout en gardant un suivi avec une infirmière passait plusieurs fois par semaine au début. Je les surveillais comme le lait sur le feu, malgré une grosse fatigue j'avançais avec pour seul objectif qu'ils aillent bien qu'ils grandissent avec le moins de séquelles possibles, je faisais ce qui fallait sans me poser de question. L'infirmière me conseilla de dormir aussi lorsqu'ils faisaient la sieste si non je n'allais pas tenir longtemps ainsi. 

Consultation postnatale : lorsque le gynécologue obstétricien m'a demandé comment j'allais, je me suis effondrée en larmes, il était surpris qu'on ne m'ait pas proposé un rdv avec la psychologue ou conseillé un suivi psychologique.

Traumatisme : je n'ai pas aimé être enceinte, mon accouchement fut un traumatisme, dont j'ai pris conscience 8 mois après. J'avais perdu ma joie de vivre, je pleurais souvent, je vivais dans l'angoisse qu'il arrive un malheur à mes enfants à mon conjoint. Je pensais au pire, je pensais que c'était dû à mon état de fatigue. Consciente de mes difficultés, je suis allée voir une psychologue qui m'a aidé à comprendre que ce que j'ai vécue est un traumatisme, que mon état est normale, et que je cesse de culpabiliser. Que contrairement à l'image idyllique véhiculée de la maternité, il y a beaucoup plus de femmes qu'on ne le pense pour qui cela n'est pas une partie de plaisir. 

 

A travers mon témoignage j'ai envie de dire :

- aux parents de prématurés de ne pas minimiser leur état psychologique, même si on a l'impression que cela va aller, le traumatisme s'installe et reste.

- au corps médical d'inclure la prise en charge psychologique des parents. Un soutien psychologique, ne serait-ce que des paroles qui nous expliquent le processus physique et psychologique du parcours de parents d'enfants nés prématurément, est indispensable.

- nous avons la chance de vivre dans un pays où la prise en charge de la prématurité, du point de vue scientifique et technique est extraordinaire. 

 

Mes enfants ont 12 ans aujourd'hui, ils ont un développement normal et ils se portent très bien. 

F, maman de L et E, nés à 31 SA et 2 jours 

 

Témoignage de E et S, parents de D, née sans vie à 21 SA et de L, née à 28SA

Nous sommes E et S, parents de D, née sans vie à 21 SA en 2011 et L née à 28SA en 2013.

E fille DES.

L est restée à l'hôpital jusqu'au terme et a été ensuite suivie jusqu'à ses 7 ans par un pédiatre de ville (en alternance avec un pédiatre en centre hospitalier du réseau régional de périnatalité).

Nous habitons dans une grande agglomération et trouver un pédiatre "spécialisé" préma a été tendu, mais nous n'avons pas eu de difficulté par la suite.

Depuis ses 7 ans elle n'a pas de suivi particulier sauf quelques rendez-vous avec une pneumo pédiatre mais vers laquelle nous avons été redirigés sans mal.

C'est une enfant qui n'a pas de difficultés scolaires, voire est plutôt en avance sur son âge en termes de maturité et de capacité et elle se développe bien physiquement.

Elle est très sensible, mais très sociable à la fois, impossible pour nous de déterminer ce qui est lié à sa prématurité ou non.

 

En ce qui concerne notre expérience en tant que parents, ayant perdu notre premier enfant et du fait de l'identification des conséquences du DES sur E, la 2nde grossesse a été abordée avec appréhension, mais "toutes" les précautions possibles ont été prises pour "gagner" le plus de temps possible sur le terme (cerclage, arrêt de travail et alitement dès le 3eme mois, mais pas d'hospitalisation en service de grossesse pathologique).

L'arrivée en service de réa / néonat a été sidérant.

L a évolué au jour le jour, et à part le stress du transfert hospitalier "subi" ainsi que le retour à la maison R.A.S.

 

E : j'ai pris conscience progressivement du stress et de l'angoisse ressentis au cours de ces évènements.

D'abord accompagnée par une pédo psychiatre de l'hôpital à la suite de la perte de D puis après la naissance de L, j'ai eu besoin de consulter à nouveau quelques années plus tard.

L avait 5/6 ans, des projections/idées morbides ou des moments d'hyper émotivité me submergeaient au quotidien (vision de L chutant dans l'escalier ou tombant sous les rames de métro, impossibilité de raconter l'histoire familiale sans larmes par exemple). J'ai donc cherché une psychologue en ville, par mes propres moyens.

Aujourd'hui, je suis plus sereine et je peux aborder notre histoire sans sentiment de culpabilité ou émotion trop débordante.

 

S : je n'ai pas ressenti le besoin d'accompagnement spécifique ni pour D ni pour L les premières années. Je suis retourné travailler rapidement après l'hospitalisation (pas de congé dédié à l'époque, à part les 11J) et j'ai "foncé". Plusieurs années après j'avais accumulé énormément d'émotions non exprimées dans mon "sac à dos". L'entourage et la société en général nous poussent à aller de l'avant et à passer à autre chose puisque "tout va bien" en tout cas pour l'enfant, dans notre cas.

Aux 9 ans de L j'ai finalement consulté une psychologue clinicienne, spécialisée en périnatalité. Elle m'avait été conseillée par un médecin généraliste que j'avais consulté pour des problèmes liés à la sexualité.

J’ai continué à la voir pendant un peu plus d'un an, cela m'a beaucoup aidé à apprivoiser mes émotions et à me sentir mieux dans ma vie de couple et en tant que père.

 

Depuis fin 2022 nous nous sommes aussi engagés en tant que bénévoles dans l'association SOS préma : pour partager notre expérience de parents de prémas et soutenir les autres parents et leurs familles.

 

En conclusion malgré le bon développement de notre fille L et le fait qu'elle ait pu bénéficier d'un suivi de qualité, nous, parents, avons manqué d'accompagnement.

Nous pensons que les conséquences psychologiques du vécu de la prématurité pourraient être mieux pris en charge.

 

E et S, parents de D, née sans vie à 21 SA et de L, née à 28SA

 

Témoignage de A, 27 ans, née à 29 SA

Je m'appelle A, j'ai 27 ans et je suis née à 29 semaines d’aménorrhée soit environ 6 mois et demi de grossesse.

 

Je me souviens pendant mon enfance, avoir été une petite fille, très timide, n'arrivant pas trop à s'intégrer dans les groupes d'amis, surtout à la maternelle où on en avait parlé à mes parents à l’époque. Pendant la période de l'école primaire, cela allait beaucoup mieux, puis au collège également, même si je rencontrais quelques difficultés d'intégration dans des groupes. Mais cela a toujours été dans le bon sens en grandissant.

 

Maintenant adulte, je peux dire que je n'ai plus aucun problème de ce côté-là, même si j’ai été dès toute petite et je pense pour le restant de mes jours très hypersensible. J'ai eu de la chance de n'avoir eu aucune difficulté scolaire, ni aucune séquelle de ma grande prématurité.

 

Depuis ma plus tendre enfant d'enfance, j'ai toujours toujours été passionné par le corps humain et voulu être médecin peut-être par inconsciemment par rapport à la prématurité je ne et c'est vers l'âge de 17 ans que je me suis dit je veux faire comme le pédiatre qui m'a sauvé la vie. Moi aussi je veux faire médecin en réanimation néonatale, je me suis inscrite en médecine. J'ai passé le concours malheureusement 2 fois sans succès comme beaucoup de monde mais à l'époque ayant 20 ans je m'étais dit ma vie était foutue. C'était vraiment ce que je voulais faire depuis toute petite avec également le métier de pharmacienne qui passait par le concours de médecine, puis j'ai fait une licence de biologie, pour tenter d'aller dans un Master spécialisé dans le médicament toujours dans l'optique de travailler dans le secteur pharmaceutique sans succès. Je me suis donc orienté, par défaut dans un Master ingénierie de la santé, qui n'est totalement hors de ma zone de confort, de biologiste et qui m'a beaucoup plu. Après un an de recherche, j'ai réussi à trouver un emploi dans le secteur de la recherche contre le cancer qui me plaît énormément. Même si mon travail n'est pas toujours facile au quotidien, cela se passe très bien et je n'ai pas du tout l’impact du manque de concentration, ou encore sociabilisation que j'ai pu avoir dans mon enfance.

 

Effectivement, je peux dire que j'ai toujours été hypersensible, hyper anxieuse, timide et refermée sur moi-même jusqu'à un certain âge. Je ressens aussi un manque de confiance en moi qui a toujours été et un besoin d'être câlinée.

 

En fait, je n'ai pas vraiment eu besoin de mettre d'action en place pour pallier ses différents symptômes, cela s'est fait avec le temps, et petit à petit, je suis devenu beaucoup moins timide et anxieuse dès la fin de mon adolescence.

 

Ma naissance prématurée n'a jamais été un lien à l'établissement d'une relation amoureuse. Actuellement fiancée et préparant mon mariage pour le mois de juin 2024. Pour les enfants, c'est plus compliqué, je n'ai jamais eu le désir viscéralement d'en avoir mais effectivement maintenant que je construis ma vie, j'aimerais en avoir même si c'est compliqué pour moi de me dire qu'une grossesse pourrait éventuellement bien se passer, ma mère, ayant fait une prééclampsie sans raison. Je souhaite avoir un enfant malgré tout car j'en ai réellement le désir, mais je pense me faire plus suivre le cas échéant. J'ai également quelques problèmes de santé qui font que je devrais être plus suivi lors d'une grossesse. Mais c'est un désir que nous avons avec mon futur mari d'avoir un enfant d'ici environ 2-3 ans. Mais oui, il y a beaucoup d'appréhension à l'idée d'une future grossesse de mon côté.

 

Lors de ma maternelle, j'étais très isolée, je n'avais pas d’amis, je n’osais pas aller vers les autres. Ce qui inquiétait les maîtresses et ma cataloguée directement comme étant pas forcément comme les autres enfants. Ce qui m'a envoyé faire une psychologue ce qui a énormément énervé ma mère car j'étais comme je suis, et pas la peine de me changer, puis j'ai déménagé lors de mon entrée au CP où je me suis fait des très bonnes amies pour la vie. Au collège cela a été un peu plus compliqué, où j'essayais de m'intégrer sans succès dans tes groupes d'amis, où on me traiter de pot de colle très clairement, jusqu'au jour où j'ai rencontré mes meilleures amies où nous avons formé un groupe très solide jusqu'au lycée. Au lycée également, je n'ai pas rencontré de soucis à me faire des amis ni à la fac, ni dans mes relations dans mon travail actuel.

 

J’ai eu de la chance d'avoir survécu, grâce à l'amour de ma famille, mes deux parents se relayer tous les jours pour venir me voir à l'hôpital plus mes grands-parents. J'ai été très entouré jusqu'à ma sortie de l'hôpital le 24 décembre 1996, et même après évidemment. Mais j'ai de la chance d'avoir survécu sans séquelles, et que mes parents ne m'ont pas couvé si je puis m'exprimer ainsi ni sur un piédestal à cause de ma prématurité. Néanmoins, ils sont très fiers de la jeune femme que je suis devenue aujourd'hui. J'ai réussi à faire des études, à m'intégrer dans la société et je construis mon avenir sans problème.

 

Je ne me sens vraiment pas différente des autres, à leur actuel par rapport à ma prématurité, ce qui n'a pas toujours été le cas, surtout dans ma petite enfance. Aujourd'hui, je me sens vraiment épanouie sur tous les plans que ce soit personnel, professionnel ou familial, et j'en suis très heureuse.

 

Pour ma part, il est évident que la prématurité doit être considérée comme effort et non pas comme une faiblesse. Bien sûr lorsqu'on survit sans séquelles, cela est beaucoup plus facile à dire, mais je pense qu'on a une part de nous en plus qui sait que la vie n'est pas toujours facile qu'il faut se battre pour tout, même pour sa vie, ce que les gens n'ont pas forcément conscience. J'envisage d'écrire un livre sur mon histoire qui abordera aussi bien les thèmes de la pathologie de la prématurité que le déroulé d’une hospitalisation dont je fais des recherches et en écrit des articles scientifiques à mes heures perdues, j'ai ce projet en tête depuis mes 20 ans, et j'espère pouvoir sortir ce livre pour mes 30 ans. La réanimation néonatale, c'est ma passion, même si ce n'est pas commun !

 

J'y pense souvent, surtout quand je revois des photos où je me dis, mais c'est moi mais ce n’est pas possible et surtout lors de mon anniversaire ou beaucoup de membres de ma famille me ressortent où est mon petit bébé même à 27 ans ! Moi qui n’étais pas censé vivre plus de 10 jours, à cause d'un choc septique, suivi d'une septicémie dont j'ai réchappé miraculeusement donc oui j'y pense bien sûr, cela fera toujours partie de mon histoire et j'espère que mon histoire sera racontée lorsque j'aurai des enfants et des petits-enfants et même après.

 

Le message que j'aimerais faire passer aux enfants prématurés inclus dans la cohorte, c'est tout simplement, soyez fiers de ce que vous êtes, soyez fier du chemin que vous ayez parcouru, même si vous n'en avez pas forcément conscience et que chaque grand prématuré a évidemment une histoire différente. Et surtout n’hésitez pas à croquer la vie à pleines dents !!

A, 27 ans, née à 29 SA